Des stars de YouTube foncent dans Genève

Deux youtubeurs français multiplient les infractions au code de la route au mépris des autres usagers. Excès de vitesse, dépassements par la droite, conduite dangereuse, leurs vidéos sont postées sur YouTube. En cas d’enquête du Parquet, le duo risque gros.

  • A partir des vidéos, des experts sont capables de déterminer la vitesse du véhicule. TR

«Une procédure pénale peut être ouverte sur la base d’un enregistrement vidéo»

Le Ministère public genevois

Sur cette chaîne YouTube qui compte plus d’1,5 million d’abonnés, c’est bien la route de Chancy que l’on voit défiler à toute allure. Au volant d’une voiture dite super-sportive, en l’occurrence une Pagani Huayra de près de 800 chevaux, deux stars françaises des essais automobiles se filment enfreignant de nombreuses règles de circulation.

Compteurs de vitesse floutés, leurs bolides s’élancent à tombeau ouvert malgré une circulation relativement dense. Dépassement par la droite, freinage intempestif, excès de vitesse, non-respect des distances de sécurité: les youtubeurs se comportent comme s’ils étaient sur un circuit.

Et de s’amuser des réactions des autres automobilistes et motards présents ce jour-là. Grosse frayeur lorsqu’une voiture de police, sirène allumée, passe justement dans le secteur. «Ouf, c’est pas pour nous!» s’exclament les compères.

Repérage

Au moins deux vidéos ont été tournées sur les routes genevoises, la dernière datant du mois de décembre 2021. A chaque fois, tels des criminels, les acolytes commencent leurs essais automobiles par des repérages. «D’habitude on fait une double vérification avant de mettre un peu de gaz, mais cette fois, on va le faire cinq fois!» annonce ainsi un des conducteurs au début de la vidéo. Une fois certains qu’aucun véhicule de police n’est présent dans les parages, place à la vitesse et à toutes les prises de risque.

Enquête

Mais, est-il possible de connaître la vitesse réelle d’un véhicule à partir de ces seules images? «Oui, nous avons des équipes spécialisées dans l’étude de ce type de document. Elles sont capables de dire à combien roulait réellement un automobiliste, notamment en se servant de points de repère dans le paysage», détaille le chef de la police routière Patrick Pulh, sans préciser toutefois si une enquête a été ouverte dans ce cas précis. Et d’ajouter: «Lorsqu’on nous signale ce genre d’événement, nous évaluons la pertinence et ouvrons une enquête si nécessaire».

De son côté, interrogé par nos soins, le garage genevois qui a prêté les voitures prestigieuses aux youtubeurs rappelle que la responsabilité en cas de problème revient au conducteur.

Sanctions?

En plus bien sûr de provoquer un drame, que risque le duo sur le plan légal en cas de plainte ou de dénonciation en Suisse? «Le Ministère public ne se prononce pas sur ce cas particulier. De manière générale, une procédure pénale peut être ouverte sur la base d’un enregistrement vidéo», informe le Parquet qui indique également que la nationalité des auteurs ne joue aucun rôle.

«Depuis Via Sicura, qui renforce la loi sur la sécurité routière (LCR), les très grands excès de vitesse comme la mise en danger des autres usagers de la route peuvent être condamnés par une peine de prison. Cela a notamment été le cas pour le «Ghost Rider» de Genève il y a quelques années (lire ci-contre). Ce motard avait été condamné à de la prison ferme pour ces excès de vitesse en pleine ville», précise Patrick Pulh.

Le «Ghost Rider» en prison

TR • Il avait défrayé la chronique en 2016: le «Ghost Rider» de Genève, un motard qui filmait ses multiples infractions au beau milieu de la circulation, avait finalement été retrouvé par la justice et condamné à 30 mois de prison ferme par le Tribunal correctionnel de Genève en janvier 2017. En cause: des multiples excès de vitesse et des délits de fuite. Autant de frasques filmées et diffusées sur les réseaux sociaux. C’est d’ailleurs une analyse de cette vidéo qui avait permis au Groupe technique de recherche de véhicules d’identifier le chauffard.