«La rue doit devenir le prolongement de nos salons»

  • La magistrate Verte Frédérique Perler sera la nouvelle maire de la Ville de Genève, dès le 1er juin.
  • Elle nous livre en primeur ses idées et ses envies pour cette année de Mairie, qu’elle veut au service de la population.
  • L’occasion aussi de faire un premier bilan un an après l’entrée en fonction de cet exécutif quasi entièrement renouvelé.

  • Frédérique Perler: «La population a des idées, on va les concrétiser!» STÉPHANE CHOLLET

  • La future maire à côté de l’hôtel à insectes qu’elle a fait installer  dans la cour de son bureau en Vieille-Ville. STéPHANE CHOLLET

    La future maire à côté de l’hôtel à insectes qu’elle a fait installer dans la cour de son bureau en Vieille-Ville. STÉPHANE CHOLLET

Dans la petite cour qui jouxte son bureau dans la Vieille-Ville, Frédérique Perler a fait aménager, au milieu des graviers, un carré de prairie, un hôtel à insectes et un tas de pierres pour les reptiles. Quant au bol vide, «c’est pour ma corneille!» lâche la conseillère administrative chargée du Département de l’aménagement, des constructions et de la mobilité. Le 1er juin, elle sera maire de la Ville. Interview exclusive.

GHI: Un an seulement après votre entrée en fonction, vous allez devenir maire. Qu’est-ce que ça fait?
Frédérique Perler:
J’aborde ce défi comme je prends la vie en général, de manière positive et enthousiaste.

– Quel est le thème de cette année de Mairie?
– La thématique s’inscrit dans la lignée de mon parcours de militante verte: rêver et habiter la ville de demain.

– Ce n’est pas très concret. Ça va donner quoi?
– La rue doit devenir le prolongement de nos salons. J’ai mandaté deux intervenantes de «Participation sur mesure». Elles vont travailler avec la population à mettre en place des projets dans l’espace public sur la thématique de l’urgence climatique, de l’eau. Cela se veut convivial, à destination de tous les âges, inventif et même scientifique! La population a des idées, on va les concrétiser! Puis, elle pourra se promener de quartier en quartier pour voir les réalisations.

– La participation, c’est aussi ce que vous mettez en place pour le futur parc de la Jonction. Ne craignez-vous pas que cela crée des usines à gaz?
– Pour ce projet, c’est une grosse machinerie. Cela va prendre plusieurs années. Mais, le côté participatif est très enrichissant. Pour les projets de cette année de Mairie, l’objectif est autre. Il s’agit de faire la démonstration qu’avec des moyens modestes, limités et une certaine sobriété, on peut embellir son quartier.

– Cette sobriété, c’est une façon de faire moins «bling bling» que l’ancien Conseil administratif?
– On cherche surtout à montrer que de petits aménagements simples et bien pensés peuvent ravir la population. On ne parle pas ici de demander à la population d’aménager tout le quartier des Eaux-Vives. Mais de permettre des petits éléments sur des tronçons modestes mais stratégiques.

– L’ancien Conseil administratif a payé l’affaire des notes de frais. Un an après votre élection, pensez-vous avoir réussi à restaurer la confiance avec la population?
– Oui. Très clairement. A l’intérieur du collège, la collaboration se passe extrêmement bien. On arrive à trouver des positions communes dans le respect des idées de chacun. Cette affaire a laissé des traces au sein de l’administration. Mais les collaborateurs et collaboratrices ressentent cette bonne entente au sein de l’exécutif.

– Mais avec la population?
– Cette année de crise sanitaire nous a un peu privés de ce retour direct de la population mais les choses reprennent peu à peu. On va pouvoir renouer ce lien.

– Et avec l’Etat? Où en est la traditionnelle bisbille Ville-Canton?
– On arrive à se parler même si on n’est pas toujours d’accord. Nous avons une volonté commune de trouver des solutions pour le bien de nos concitoyens.

– Reste que vu les projets d’envergure nationale et cantonale, la Ville subit une grosse pression. Vous allez pouvoir suivre?
– C’est vrai qu’entre le réaménagement de Cornavin, le PAV (Praille-Acacias-Vernets), etc., il y a beaucoup de projets ambitieux. Et les communes doivent monter dans le train. Or, on n’a pas toujours les moyens. C’est le défi: pouvoir mener plusieurs projets d’envergure.

– Pas toujours facile pour une Verte de construire sans être traitée de bétonneur. Comment gérez-vous cela?
– Très bien. Tout d’abord, j’hérite de certains projets. La place des Augustins par exemple. Les travaux ont débuté à mon arrivée, impossible de tout stopper. Je suis persuadée qu’on gagne à laisser vivre ce lieu et procéder aux améliorations suite au retour des riverains. Chaque lieu répond à une fonctionnalité. Ainsi, la plaine de Plainpalais est appréciée par certains, décriée par d’autres. Si on y met une forêt, on ne peut pas y mettre des fêtes foraines, des marchés. Il faudra les mettre ailleurs. Il y a toujours les pour et les contre. C’est le charme de Genève!

– Le mieux, c’est encore de faire avancer les projets de nuit avec un pot de peinture comme pour les pistes cyclables?
– Ça, c’est la légende. Ce qui est vrai et qui a pu surprendre, c’est qu’en quelques jours la Ville et le Canton dessinent ces pistes. Mais c’est magique! Vous avez une partie des citoyens et citoyennes qui se sont levés un matin et se sont dit qu’est-ce que je me sens bien sur ces pistes cyclables. Ça a été une réponse à une demande qui n’osait même plus s’exprimer tant l’emprise de la voiture a été importante. Je parle au passé car c’est heureusement en train de changer.

– Donc, si c’était à refaire?
– Je ferais pareil. Je suivrais Serge Dal Busco (ndlr: conseiller d’Etat chargé des Infrastructures) sans hésitation!