Des endorphines pour lutter contre le suicide

SUICIDE • Mettre fin à ses jours reste, chez les jeunes adultes, la première cause de décès. Savoir détecter le mal-être d’un adolescent peut lui sauver la vie.

  • Le suicide reste la première cause de mortalité des jeunes entre 15 et 24 ans.

    Le suicide reste la première cause de mortalité des jeunes entre 15 et 24 ans.

A première vue, le Fepalcon 1000 ressemble à n’importe quelle boîte de médicaments. Sauf que celle-ci renferme deux barres du célèbre Ragusa de Camille Bloch. Distribué, nous dit l’emballage, par le laboratoire CHUIZENE (ndlr: comprendre «J’suis zen») et composé de l’unique principe actif Tamieuafair («T’as mieux à faire»). Le Fepalcon («Fais pas le con») parlera surtout aux jeunes adeptes du langage sms.

Prévention juvénile

Pour cause, les jeunes sont le public cible de cette originale campagne de sensibilisation contre le suicide mise en place par la fondation Children Action et les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Si le taux de suicide pour 100’000 habitants a considérablement baissé dans notre pays entre 1991 et 2011, passant de 20,7 à 11,2 le phénomène reste alarmant, particulièrement chez les jeunes adultes. En effet, le suicide reste la première cause de mortalité des jeunes entre 15 et 24 ans selon les chiffres de l’Office fédéral de la statistique (OFS) les plus récents. En moyenne, cela correspond à un suicide de jeune tous les trois jours.

Infantilisation?

Distribuer des Ragusa pour combattre ce mal, n’est-ce pas une manière d’infantiliser le problème? Interrogée à ce sujet, Stéphanie Kolly, directrice de la fondation Children Action est catégorique: «L’important n’est pas le chocolat à l’intérieur de la boîte, mais l’outil de communication en lui-même. Laissé sur une table à l’attention du jeune, le Fepalcon peut permettre d’amorcer une discussion parent-enfant. Le but est de sensibiliser tout l’entourage du jeune, du parent au pédiatre, en passant par l’enseignant, pour créer un filet de sécurité autour de lui.» La sensibilisation a d’autant plus d’impact sous cette forme que, comme le souligne Nathalie Schmid Nichols, responsable du Centre d’étude et de prévention du suicide (CEPS) aux HUG, «nous sommes dans une société où lorsque l’on ne va pas bien on aspire à une réponse immédiate et unique face à la souffrance. Il est important de prendre du recul et de ne pas rester seul, en s’adressant à des professionnels.» Et justement, le professionnalisme de la ligne HelpAdoLine est le cœur du dispositif mis en place par le CEPS. Ne répondent aux ados qui composent le numéro que des professionnels des soins médicaux capables d’orienter directement le jeune vers un suivi approprié et, exclusivité romande, d’organiser son hospitalisation ambulatoire dans les cas les plus problématiques. Seul bémol, cette prise en charge médicale ne s’applique qu’aux jeunes résidant sur sol genevois, bien que les appels reçus viennent des différents cantons romands. Les jeunes Vaudois sont donc renvoyés vers le CHUV et les institutions compétentes.

Selon le Dr Holzer responsable de l’Equipe mobile adolescents, «une discussion est en cours pour mettre en place une ligne d’urgences psychiatriques qui favoriserait la prise en charge des personnes suicidaires». Une initiative salutaire, car l’écoute active à l’inverse du chocolat peut, dans ces cas-là, sauver des vies… Plus d’informations sur le Fepalcon 1000: www.fepalcon.ch Plusieurs sites internet proposent de l’aide et des informations utiles sur le suicide: www.stopsuicide.ch, www.ciao.ch; www.telme.ch

Mal-être des jeunes: y a-t-il des signes révélateurs?

CW • Lorsqu’elles ont lieu, les crises suicidaires à l’adolescence sont souvent des crises «existentielles». Comme le souligne Nathalie Schmid Nichols, responsable du CEPS: «L’adolescent est projeté dans un avenir qui l’inquiète et est amené à se poser un grand nombre de questions». Les signes les plus révélateurs du mal-être d’un jeune résident souvent dans un «changement soudain du comportement». Un jeune aux idées suicidaires aura par exemple tendance à adopter une attitude de retrait social qui se traduira fréquemment par une augmentation de l’absentéisme scolaire et parfois même par des fugues. La consommation d’alcool, de drogues, les troubles de comportements alimentaires ou encore des manifestations physiques répétées, comme les maux de ventre ou de tête, peuvent également être des symptômes révélateurs.