Elèves interdites de gym près de la Mosquée

COLLÈGE ANDRÉ-CHAVANNE • Leur prof évoque un incident survenu en 2009 pour justifier sa décision. Grogne des parents.

  • En 2009, des étudiantes de l'école André-Chavanne avaient été insultées par des fidèles de la Mosquée.

    En 2009, des étudiantes de l'école André-Chavanne avaient été insultées par des fidèles de la Mosquée.

Une prof de gymnastique de l'école André-Chavanne a empêché ses élèves le mois dernier de participer à un cours de gymnastique sur le terrain d'athlétisme. La raison? Le stade est proche de la Mosquée du Petit-Saconnex et il y a trois ans, des étudiantes en tenue de gym avaient été insultées par des fidèles. Des explications qui ont choqué des parents.

Choqués

«Je trouve inadmissible que ma fille de 16 ans ne puisse pas aller courir en tenue de gym sous prétexte que la Mosquée se trouve à proximité du stade de l'école!» s'emporte le père d'une élève de 16 ans. Et une mère de famille de renchérir: «Pourquoi vouloir remettre de l'huile sur le feu? Nos enfants n'ont pas compris les réelles motivations de leur professeur. L'incident qu'elle a évoqué est ancien et depuis lors, il n'y a plus jamais eu de problèmes!»

Précautions

Mais revenons à ce vendredi de début octobre, jour de prière. Les filles insistaient pour courir à l'extérieur, comme les garçons. Pour justifier son refus, la prof rappelle qu'en 2009, une classe de filles, sortie également courir le vendredi, avait été insultée… Les fidèles leur avaient même jeté des cannettes de sodas. Un fait divers qui avait mis en ébullition tant le Département de l'instruction publique (DIP) que la Mosquée. Les responsables de la Mosquée avaient alors présenté des excuses et promis de tout mettre en œuvre pour que de tels incidents ne se reproduisent plus. De son côté, le DIP avait renoncé à déposer plainte.

La peur du prof

Voilà que trois ans plus tard, l'affaire ressurgit. «Il ne s'agit pas d'une décision de l'école mais celle d'un professeur isolé», tient à souligner Patrick Netuschill, doyen à l'école André-Chavanne. «L'enseignante avait prévu son cours à l'intérieur, détaille-t-il. Il est vrai qu'elle a argumenté son refus en rappelant notamment ce qui s'était passé en 2009. Elle a le droit de le faire, surtout si elle estimait que cette activité extérieure pouvait mettre son cours en danger. Et cela au même titre qu'un refus de se rendre, par exemple, dans un musée si des élèves sont turbulents.»

«Nous désapprouvons»

De son côté, la direction de la Fondation culturelle islamique de Genève tient à souligner: «Nous n'avons pas eu connaissance que de tels événements se soient à nouveau produits. Cependant si cela était le cas, la position de la Mosquée et de sa direction n'a pas changé: nous désapprouvons de manière catégorique les agissements de ces fidèles, dont le mauvais comportement et les incivilités sont contraires aux enseignements de l'Islam.»

Sage décision

Ch/Z • Pour Hafid Ouardiri, ancien porte-parole de la Mosquée, la réaction de la professeur est sage: «Nous vivons dans une société plurielle où il est important de respecter ce que chacun veut exprimer. En renonçant à faire courir des jeunes filles en shorts devant les fidèles de la Mosquée, je pense que l'enseignante a pris une décision réfléchie. «Je trouve mieux que l'on anticipe un éventuel problème qui pourrait être pris comme une provocation.»Le médiateur de paix tient toutefois à rappeler aux fidèles de la Mosquée qu'ils ne doivent pas, de leur côté, dicter la manière de vivre des occidentaux: «Il est indispensable de respecter les cadres des autres. Il est aussi important que les fidèles sachent qu'il y a une école et un stade près de la Mosquée, et qu'ils doivent respecter l'espace de vie des étudiantes, vêtues ou non d'une tenue de gymnastique. Ils ne doivent pas s'en offusquer.» Et Hafid Ouardiri de conclure: «La meilleure solution ne serait-elle pas de planter des arbres ou une haie bien verte et fournie qui feraient de l'ombre entre la Mosquée et le stade?»