Climat: pourquoi (presque) tout le monde s’en fout!

  • Le dérèglement climatique inquiète les citoyens, surtout les jeunes, qui manifestent en masse.
  • A Genève comme ailleurs, l’inaction des politiques tranche avec la détermination des manifestants.
  • Comment expliquer ce décalage? Les lobbys économiques sont pointés du doigt. Notre dossier.

  • Le climat se réchauffe inexorablement. L’humanité court-elle à sa perte? PIXABAY

    Le climat se réchauffe inexorablement. L’humanité court-elle à sa perte? PIXABAY

«Le climat n’est pas au cœur des préoccupations des Genevois»

Benoît Genecand, conseiller national PLR

«Les politiques restent incohérents en matière de climat», dénonce Lisa Mazzone, conseillère nationale écologiste (Les Verts). «En prévoyant le développement des vols à l’aéroport de Genève, la construction de nouvelles routes sur des zones naturelles de grande valeur ou en traînant des pieds dans la rénovation des bâtiments, la majorité politique échoue à protéger le climat, malgré les beaux discours», s’inquiète l’écologiste.

Fossé générationnel

Un avis que ne partage pas du tout Benoît Genecand, conseiller national PLR: «Si la population mettait en tête la question du climat, le parti des Verts serait largement majoritaire aux niveaux national, cantonal et communal. Ce n’est pas le cas et cela ne le sera pas en 2019. Le climat n’est pas au cœur des préoccupations des Genevois.»

Vraiment? Alors comment expliquer que malgré les oppositions politico-politiciennes, la question du climat pousse les jeunes à manifester en masse. Ils étaient plus de 5000 à descendre dans la rue, le vendredi 18 janvier, pour protester contre l’inaction des gouvernements face au réchauffement climatique. Et le prochain round, agendé le vendredi 15 mars à l’occasion de la grève mondiale pour le climat, s’annonce d’ores et déjà chaud, chaud, chaud du côté de la mobilisation (lire encadré).

Faut-il y voir un fossé générationnel? Marine Decrey, présidente de l’association Swiss Youth for Climate, en est convaincue: «Les jeunes souhaitent que l’Etat agisse. Or, la moyenne d’âge de nos politiciens se situe autour de 50 ans et ne représente donc pas ou peu les intérêts des nouvelles générations.»

Consciente du chemin à parcourir pour faire bouger les lignes, Yvonne Winteler, présidente de l’association Climat Genève, ne baisse pas les bras pour autant: «De plus en plus de citoyens sont convaincus qu’il faut changer nos modes de vie et les règles du jeu économique pour répondre à la crise climatique.» Avant d’avancer des solutions: «Il faut investir dans les transports publics du canton et enfin introduire des taxes sur les modes de transports particulièrement polluants pour financer les mesures du plan climat.»

Des solutions concrètes

Pour Benoît Genecand pas besoin d’aller si loin, des changements de comportement sont immédiatement possibles: «On peut voyager moins en voiture ou en avion, manger moins de viande de bœuf, acheter moins de babioles électroniques qui produisent des tonnes de CO2 ou encore réduire la taille de son logement.»

Insuffisant pour Lisa Mazzone: «Nous devons développer un réseau de pistes cyclables et renoncer aux nouvelles routes sur des zones de nature, introduire un couvre-feu à 22h à l’aéroport de Genève, accélérer sérieusement la rénovation des bâtiments pour réduire leur consommation d’énergie en interdisant notamment l’installation de nouveaux chauffages à énergie fossile.»

Et Marine Decrey de conclure: «Le monde économique va devoir s’adapter, car la planète ne peut plus supporter nos modes de consommation.»

Une grève du climat dans 60 pays

Vendredi prochain, le 15 mars, des manifestations d’étudiants, de collégiens et de lycéens, en faveur du climat sont prévues un peu partout dans le monde. De Kyoto, au Japon, à Honolulu, aux Etats-Unis, en passant par Rio de Janeiro, au Brésil, et Jaipur, en Inde, plus de 60 pays se mobiliseront. A Genève, la grève du climat est prévue sur la place des Vingt-Deux-Cantons dès 14h. Que demandent les initiants? Une neutralité carbone d’ici à 2030, une déclaration de l’état d’urgence et davantage de justice climatique. Avec comme ambition finale de changer le système en profondeur pour atteindre ces objectifs. Les jeunes manifestants rappellent dans un manifeste commun que «l’humanité court à sa perte». Et d’ajouter: «Depuis plus de cinquante ans, les scientifiques alertent sur la catastrophe qui nous guette mais les puissants de ce monde, pouvoirs publics et multinationales, continuent leur course à la croissance, agissant comme si l’urgence climatique ne les concernait pas. Aujourd’hui nous assistons à ce qui s’annonce comme étant la sixième extinction de masse [des animaux].»