«La longueur de la procédure est, pour les victimes, difficile à supporter»
Robert Assaël, avocat de quatre des victimes
L’agression remonte au 8 août 2018. Ce matin-là, place des Trois-Perdrix, au pied de la Vieille-Ville, cinq femmes sont violemment tabassées. C’était il y a plus d’un an et il faudra attendre 2020 pour qu’un procès ait lieu. Un délai «difficile à supporter» pour les victimes, selon les mots de l’avocat de quatre d’entre elles, Me Robert Assaël.
Détention provisoire prolongée
L’instruction, aux mains de la justice française, est toujours en cours. Ils sont désormais cinq hommes, âgés de 20 à 25 ans, mis en examen pour violences volontaires et tentative d’homicide. Pour rappel, quatre arrestations avaient eu lieu fin 2018. Le vice-procureur de la République d’Annecy (France), Pierre Filliard, nous révèle que, «suite aux déclarations du quatuor, un cinquième individu a été interpellé au printemps». Ce dernier est le seul à rester en liberté dans l’attente du procès.
Les quatre autres sont derrière les barreaux depuis leur arrestation. Et, pas plus tard que vendredi 6 septembre, le juge des libertés et de la détention a décidé de prolonger leur détention provisoire. «La violence des comportements ainsi que les antécédents judiciaires des mis en examen a sûrement joué un rôle dans sa décision», estime le vice-procureur haut-savoyard.
Les cinq inculpés, originaires de la région de Thonon et n’ayant aucun lien de parenté entre eux, ont tous un casier judiciaire portant pêle-mêle les mentions de recels, vols, extorsions, violences aggravées ou encore appels téléphoniques malveillants.
«Pour l’un des agresseurs, l’expert psychiatre a retenu une dangerosité psychiatrique et criminologique, notamment au regard de 13 condamnations antérieures», précise Me Robert Assaël. L’avocat genevois n’a de cesse de souligner la brutalité de ce tabassage: «Donner un coup de pied à la tête comme un footballeur tire un penalty dénote la violence extrême, bestiale et gratuite des agresseurs.» Et de rappeler que l’une des victimes a vu son pronostic vital engagé tandis que, plusieurs jours après les faits, une autre portait encore les traces de chaussures de son assaillant sur le visage. «Elles n’oublieront jamais», lâche-t-il.
Si les unes et les autres ont pu donner des indications, notamment de tenues vestimentaires qui permettent d’identifier certains des agresseurs, le rôle exact des mis en examen reste difficile à déterminer. D’autant que «tous nient leur participation directe aux faits», stipule le vice-procureur Pierre Filliard.
Ils confirment uniquement leur présence sur les lieux mais en tant que simples spectateurs de la scène. «Lâchement, aucun des auteurs n’assume ses actes, s’insurge Me Robert Assaël. Ils ne s’en souviennent pas ou les contestent. Leurs dénégations vont à l’encontre des évidences du dossier et aggravent les souffrances des victimes.»
Des photos des lieux
Résultat, les enquêteurs français peinent à établir qui a fait quoi. Pour tenter d’y voir plus clair, une commission rogatoire internationale a été transmise à la justice genevoise juste avant l’été. «Nous exécutons l’entraide qui est sur le point d’aboutir», indique à ce sujet le Ministère public.
«L’idée, c’est notamment de mieux comprendre la configuration des lieux grâce à des photographies», selon Pierre Filliard. Me Assaël aurait, quant à lui, préféré une reconstitution. Mais, l’organiser s’avérait compliqué.
Craintes des représailles
A Annecy, le juge d’instruction espère boucler son dossier en début d’année 2020. Il s’agira alors de déterminer si la tentative d’homicide est maintenue. Si c’est le cas, l’affaire passera devant la cour d’Assises de Haute-Savoie (France). Le planning des audiences étant particulièrement chargé, le procès ne pourrait être traité avant l’automne 2020. Si seules les violences aggravées étaient retenues, c’est devant le Tribunal correctionnel que les auteurs présumés comparaîtraient. Peut-être avant l’été.
Une attente difficile pour les victimes, comme le martèle leur avocat, avant de conclure en leur rendant hommage: «Mes clientes ont eu un courage extraordinaire de s’engager dans cette procédure, alors qu’elles avaient des craintes de représailles. Elles le font pour qu’une telle barbarie ne se reproduise plus!»