Non la syphilis n’a pas disparu!

Réapparue depuis le début des années 1990, la syphilis se propage lentement en Suisse, le nombre de personnes atteintes ayant triplé depuis une décennie. Les hommes homosexuels représentent la population la plus touchée.

  • Le préservatif permet de limiter les risques d’infection. 123RF/LIGHTFIELDSTUDIOS

    Le préservatif permet de limiter les risques d’infection. 123RF/LIGHTFIELDSTUDIOS

On la croyait disparue, quasi éradiquée, mais les chiffres tendent à démontrer le contraire. Longtemps crainte, la syphilis est de retour dans nos pays depuis une trentaine d’années. Pire, les chiffres ont tendance à montrer une augmentation continue. L’Office fédéral de la santé publique rapporte près de 900 cas pour l’année 2019, 80 pour le seul canton de Genève. Principale catégorie concernée: les hommes d’orientation homosexuelle, qui représentent environ deux tiers des cas. Si l’on y ajoute les hétérosexuels, les hommes représentent 90% des personnes atteintes.

Bactérie en cause

Cette maladie sexuellement transmissible (MST) est due à une bactérie, le tréponème pâle qui se transmet lors de rapports non protégés lorsqu’un des deux partenaires est infecté. Ce dernier en sera d’ailleurs d’autant plus contagieux qu’il en sera lui-même aux premiers stades de la maladie. Problème: la transmission est très facile, tous les types de rapports sont contaminants, et même un baiser profond peut l’être.

Environ trois semaines après le rapport contaminant, les premiers symptômes de la maladie – celle-ci peut aussi être totalement asymptomatique – apparaissent, sous la forme d’un petit ulcère souvent indolore et donc difficile à détecter, que l’on peut retrouver au niveau des organes génitaux, de l’anus, de la bouche ou de la gorge. Même sans traitement, l’ulcère tend à disparaître, faisant croire à tort que la maladie est guérie.

En réalité, cette dernière évolue silencieusement vers une seconde phase, marquée par l’apparition de ganglions, d’atteintes oculaires et une éruption cutanée au niveau des mains et des pieds, avant de disparaître, là aussi spontanément. Seulement voilà: la bactérie est en réalité toujours là. Dix à trente ans plus tard, de graves complications cardiaques, vasculaires ou même neurologiques peuvent survenir, et même aboutir au décès du malade.

Comportements à risques

Longtemps incurable, la syphilis se soigne très bien aujourd’hui grâce à des antibiotiques, en général de la pénicilline, et ce dès lors qu’elle est administrée suffisamment tôt, ce qui implique que le patient sache qu’il est contaminé. C’est dire l’importance des tests systématiques de dépistage chez les populations à risques qui doivent bien être conscientes que cette maladie ancienne existe encore bel et bien chez nous.

«C’est d’ailleurs le principal problème, explique un épidémiologiste. La résurgence de la syphilis est due à la multiplication des conduites à risques chez des personnes plutôt jeunes qui éprouvent un faux sentiment de sécurité et tendent à oublier – raréfaction des campagnes de sensibilisation et généralisation des trithérapies pour traiter le VIH obligent – l’importance du préservatif.»

Car s’il n’assure pas une protection totale contre la syphilis, en raison des transmissions interbuccales, le préservatif représente un moyen incontournable pour limiter les risques d’infection. Couplé à un dépistage sérieux et un traitement précoce de tous les partenaires infectés, il pourrait permettre une fois de plus de mettre aux oubliettes cette maladie qui a terrorisé des générations entières de nos ancêtres. CA