Un présentateur du Téléjournal saisit la justice

JUSTICE • Philippe Revaz, le présentateur principal du 19h30 à la RTS a déposé plainte à la suite d’un commentaire posté sur Internet. L’affaire est entre les mains du Ministère public. Explications.

  • Capture d'écran RTS

Le 14 avril 2022, moins de deux mois après l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le navire militaire russe Moskva est coulé par des missiles ukrainiens. Le présentateur du journal télévisé de la RTS, Philippe Revaz réagit dans la foulée sur les réseaux sociaux. Il ironise sur cette actualité en postant le message suivant sur Twitter (rebaptisé récemment X), accompagné d'un lien de l’Agence France Presse (AFP): «Pensée pour l'amiral qui va devoir passer le coup de fil au Kremlin». Un internaute, qui n'a visiblement pas apprécié ce message, répond de manière cinglante en commentaire en traitant Philippe Revaz de «journalope» et en donnant des indications, réelles ou supposées, sur les lieux où il se déplace.

Le journaliste dépose alors une plainte auprès de la police pour injure et menace. Mais comme l'internaute a posté son message sous pseudonyme, il s'écoule plus d'un an avant qu'il ne soit identifié. Il est finalement convoqué dans les locaux de la police genevoise en juin dernier. Devant les agents, le prévenu admet être l'auteur du tweet. Son téléphone portable est saisi et il est dans l'attente d'une éventuelle décision judiciaire. Contacté, le Parquet genevois ne dit mot. «Le Ministère public ne répond jamais à ce type de question», indique succinctement Olivier Francey, chargé de relations médias du Pouvoir judiciaire.

Le frein de l’anonymat

Joint, l’auteur du tweet livre son commentaire. «Je regrette que mes propos en ligne aient eu pour conséquence de mobiliser les ressources de la police qui a déjà beaucoup de travail dans des affaires autrement plus graves. Si je déplore mon tweet sur la forme, je ne renie pas le fond qui visait à dénoncer la partialité de certaines vedettes de la télévision d'Etat», souligne-t-il. Egalement sollicité, Philippe Revaz n'a pas donné suite.

Les cas tels que celui visant le journaliste font-ils florès? Du côté de la police, on relève que les plaintes pour injures ou menaces sur la Toile restent infimes. Ce que confirme Me Nicolas Capt, spécialisé dans le droit des médias, des nouvelles technologies et de la réputation en ligne:«Il ne fait pas débat que de très nombreux comportements en ligne sont formellement constitutifs d’injure ou de menace. Cela étant, il n’est pas certain que cela se traduise par une hausse significative des procédures portées devant les autorités pénales. Les écueils sont, en effet, nombreux, le premier étant l’anonymat fréquent des publications, qu’il est parfois difficile de dépasser sans que l’Etat ne doive dépenser des sommes disproportionnées aux enjeux.»

90 jours-amende

L’homme de loi ajoute que l’injure, soit le fait d’attaquer autrui dans son honneur par la parole, l’écriture, l’image, le geste ou des voies de faits est punie, au maximum, d’une peine pécuniaire de 90 jours-amende. La menace, quant à elle, expose son auteur à peine pécuniaire ou privative de liberté de trois ans au plus.