Le cerf est mort

  • Le jeune cerf dans le cimetière de Châtelaine. STÉPHANE CHOLLET

Ecœurant, honteux, criminel, indigne, ou alors bande de sauvages, d’incapables, etc.
Les internautes se sont déchaînés en masse sur les réseaux sociaux le week-end dernier. Dans leur viseur: les gardes de l’environnement et les policiers qui ont pris la décision d’abattre un jeune cerf égaré dans le cimetière de Châtelaine (FB GHI 19.02.21).
Pour une majorité de commentateurs, le jeune animal, certes apeuré, était inoffensif et ne représentait aucun danger pour les vivants… Pour certains, il apportait même de la vie dans un lieu qui d’ordinaire en manque profondément.
Bref, il s’agissait surtout d’une pauvre bête qu’il fallait sauver à tout prix.
Un peu comme si libérer l’animal pris au piège permettait à chacun d’échapper, provisoirement, à sa propre condition de prisonnier d’un funeste semi-confinement. De se soustraire à sa propre vulnérabilité, son impuissance, sa solitude et son angoisse du pire.
D’une manière certaine, sauver l’animal revenait donc à ouvrir une perspective d’espoir dans l’avenir et célébrer, par un acte de bravoure, la fin symbolique des sacrifices.
C’est un peu tout ça qu’exprimaient les gens.
Consciemment ou non, et malgré toutes les embûches à surmonter, les autorités auraient dû se montrer à la hauteur des attentes. Comprendre qu’elles avaient là une occasion extraordinaire d’apaiser les esprits, gagner les cœurs et redonner à la population confiance dans son action qui, ces derniers mois, punit souvent sans toujours donner d’explications compréhensibles et acceptables.
Rien que pour cela, il fallait sauver le cerf.
Mais voilà, le cerf est mort… Froidement abattu au nom de la sécurité, il emporte dans la tombe un peu de notre confiance dans le monde d’après.