Le tram bleu broie du noir

Le véhicule historique repose sous une bâche au rondeau de Carouge. Les TPG demandent au propriétaire, la Compagnie ferroviaire du Léman, de le déplacer sous peine de démolition.

  • Le tram à la robe azur (en médaillon) repose, bâché, au rondeau de Carouge. DR

    Le tram à la robe azur repose, bâché, au rondeau de Carouge. DR

  • Le tram bleu lors des belles années. DR

Qu’est devenu le tram bleu? Vous savez, cette automotrice aux charmes désuets métamorphosée en restaurant ambulant. Utilisé pour des cocktails, des opérations de promotion ou encore pour promener les touristes dans la cité genevoise, le véhicule à la robe azur a disparu des radars. C’est au rondeau de Carouge que l’on retrouve sa trace.

Garé dans ce cul-de-sac, ce tram végète, emmailloté dans une bâche. «Il est en train de mourir là», se désespère Alain Primatesta, membre de la Compagnie ferroviaire du Léman (CFDL). L’association est propriétaire de l’engin. «Il y a vingt ans, on a décidé de sauver ce tram», raconte ce passionné.

Chasse-neige puis salon à cocktails

A l’époque, le véhicule est rouge, on se souvient l’avoir vu changé en chasse-neige dans les rues de Carouge après la «neige du siècle» en février 1985. «On a vidé l’intérieur pour le transformer en salon. On l’a restauré et repeint et c’est ainsi qu’il est devenu le tram bleu», poursuit Alain Primatesta.

Grâce à une concession de chemin de fer délivrée par Berne, le tram bleu circule sur le réseau ferré des Transports publics genevois (TPG). S’ensuivent de belles années. «On a reçu du beau monde à bord», se souvient, ému, Alain Primatesta, vieilles photos à l’appui. Durant ces années, quand il ne voyage pas, l’engin rejoint le dépôt du Bachet-de-Pesay. «Il y avait sa place selon un accord tacite convenu avec l’ancien patron des TPG, Christophe Stucki», insiste le représentant de la CFDL.

«Solution provisoire»

Fin 2019, le tram bleu est déplacé par les TPG de la boucle de Lancy-Pont-Rouge-Gare à la boucle de rebroussement du rondeau de Carouge. Une «solution provisoire» selon les termes du porte-parole des TPG, François Mutter. «L’évolution du réseau tram à Genève, soit le prolongement et/ou le lancement de nouvelles lignes, ne permet plus aujourd’hui aux TPG d’accorder la facilité demandée.»

De plus, l’opérateur de transports publics doit restituer prochainement à l’Etat de Genève, qui en est propriétaire (aucune date officielle n’est encore fixée), la parcelle «en son état initial, c’est-à-dire sans matériel ou véhicule roulant stationné». D’où la demande adressée à la CFDL de récupérer son tram. Sous peine que celui-ci soit démoli.

Inclus dans un projet touristique

De quoi faire bondir le «papa du tram bleu»: «C’est une belle histoire que celle de ce tramway. C’est un morceau de notre patrimoine. Ce véhicule appartient aux Genevois! Il fonctionne. On ne peut pas le laisser mourir.» Arguant qu’il souhaite intégrer cet engin dans un projet touristique, malheureusement freiné par la crise sanitaire, Alain Primatesta demande qu’il soit remis à l’intérieur et en appelle au conseiller d’Etat chargé des Transports, Serge Dal Busco.

De leur côté, les TPG indiquent qu’ils ne sont «pas intéressés par un partenariat commercial avec la CFDL», mais ont formulé une proposition de médiation pour trouver une solution et sont «disposés, dans la mesure du possible, à prendre en charge les frais relatifs au déplacement du lot de véhicules concerné jusqu’à un lieu choisi par la CFDL qui n’impliquerait pas les TPG».