Le recrutement en direct déçoit bien des apprentis

FORMATION • Trop d’appelés et pas assez d’élus? L’apprentissage a la cote mais l’offre est encore insuffisante malgré les efforts de l’Etat et des entreprises.

  • 503 places d’apprentissage dans le domaine de la santé/social étaient offertes en 2023. 123RF

Le recrutement d’apprentis en direct, organisé à Balexert le 18 janvier, aurait-il été victime de son succès? Initié par l’Office pour l'orientation, la formation professionnelle et continue (OFPC), dans le cadre du Village santé-social, l’événement a suscité des déceptions parmi les candidats. Certains n’ont en effet pas réussi, affluence oblige, à franchir 
la première étape. Autrement dit: à obtenir un ticket et tenter de décrocher une place pour la rentrée automnale de 2024.
«Il est 14h30, je suis à Balexert. J’ai accompagné mon fils en quête d’une formation. La file d’attente est impressionnante. Certains jeunes, qui avaient été confrontés au même phénomène lors de précédentes sessions de recrutement, sont venus à midi alors que les entretiens doivent, selon les annonces officielles, débuter à 15h.» C’est Aline, une mère de famille, qui parle. Elle a dû jouer des coudes pour que son fils puisse décrocher le ticket d’entrée. Elle n’est pas la seule, d’autres familles présentes oscillent entre crispation et découragement. «Les candidats qui se sont présentés à 15h ont dû repartir bredouille», reprend Aline qui ne décolère pas.

Besoins importants
Le Canton, qui a ces dernières années consenti maints efforts pour revaloriser l’apprentissage, peine-t-il à trouver des entreprises formatrices? Yanik Marguerat, chargé de communication à l’OrTra santé-social, partie prenante à l’événement, explique que dans les professions qu’il représente il n’est pas rare que les apprentis commencent 
leur formation à 15 ou 16 ans. 
«C’est le cas des laborantins par exemple mais ça l’est moins pour 
les futurs assistants en soins communautaires ou en socio-éducatif. Des employeurs sont parfois réticents à engager des mineurs. En effet, certaines situations, comme l’exposition à l’agressivité des patients ou le contact avec la mort, nécessitent une certaine maturité. Les jeunes ont donc besoin d’un encadrement que les entreprises formatrices ne peuvent pas déployer facilement.»
Soit. Et au-delà? Le secteur économique est-il à la peine pour former 
la relève? Damien Berthod, directeur du Service de l'information scolaire et professionnelle observe: «En 2023, l'offre genevoise totale de places d'apprentissage a crû de 16% par rapport à l'année précédente, notamment dans des secteurs d'activité en tension comme l'hôtellerie-restauration et la construction, mais aussi la santé et le social. Pour ce dernier domaine, 503 places étaient offertes à la rentrée 2023, soit 15% de plus qu’en 2022. Toutefois, le ratio places d'apprentissage/postes de travail est de 1,7% à Genève, contre 
une moyenne nationale à 4,8%, signe que les entreprises peuvent/doivent encore offrir plus d’opportunités de formation.»
Selon lui, les besoins de relève et l’intérêt des jeunes dans le domaine santé-social, sont importants. En atteste le taux de participation à 
des événements tels que les recrutements en direct.

Age minimum?
Alors? Genève est-il plus contraignant quant aux critères d’apprentissage, ce qui justifierait son pourcentage plus faible en termes de formation en entreprise? «Les règles imposées aux employeurs sont édictées au niveau fédéral et s’appliquent à l’identique dans tous les cantons. Mais les critères du contrat d’apprentissage sont définis par chaque entreprise. C’est 
la raison pour laquelle, en particulier dans le domaine de la santé et du social, un âge d’entrée en formation à 18 ans peut être demandé», reprend le directeur de l’information scolaire. Et d’ajouter que 
le Département de l’instruction publique (DIP) encourage toutefois une entrée en apprentissage dual dès le terme de la scolarité obligatoire (soit 15 ans, conformément aux recommandations propres à cette filière).
Quelles mesures le DIP envisage-t-il pour doper l’apprentissage en général? «Avec, les associations professionnelles, il prospecte activement et facilite les démarches administratives. En outre, l’orientation, en particulier à l’échelle du Cycle d’orientation, est soutenue via la prestation d’encadrement Go Apprentissage. Enfin, de nombreuses actions de promotion, comme la sensibilisation des futurs apprentis et des parents sur la diversité de cette filière et ses perspectives d’avenir, sont menées.»