Etats-Unis-Iran: ce conflit nous concerne!

Nous, Suisses, ne sommes évidemment pas une grande puissance. Mais nous avons des cerveaux, des cœurs et des âmes. Pour comprendre toutes les parties d’un conflit. Et leur donner la parole.

  • Dans la crise entre les Etats-Unis et l’Iran, Genève peut servir de lieu de dialogue. 123RF/KAREN ROACH

    Dans la crise entre les Etats-Unis et l’Iran, Genève peut servir de lieu de dialogue. 123RF/KAREN ROACH

Genevois qui lisez ces lignes, félicitez-vous d’habiter une ville internationale! Pas seulement parce qu’elle abrite un nombre impressionnant d’institutions, mais parce que la savoureuse complexité du monde se rencontre à chaque coin de rue. Nous, Suisses, enfants d’un pays multiple, avec plusieurs langues, plusieurs religions qui ont (finalement) réussi à coexister, sommes après tout assez bien placés pour exercer sur les sociétés humaines une vision fractionnée, n’embrassant pas une seule cause, mais plusieurs, qui s’entrechoquent, se contredisent, et parfois se combattent. Le conflit, la guerre sont dans la nature humaine. Nous ne les éradiquerons pas. Mais tout au moins pouvons-nous, d’ici, entreprendre toutes choses pour en saisir les enjeux. Et donner la parole à tous les antagonistes, sans exception.

Genève, lieu de dialogue

Ainsi, le conflit entre les Etats-Unis et l’Iran. Nous n’allons pas, nous Suisses, le résoudre, cela n’est simplement pas dans notre pouvoir. Mais de chez nous, et notamment de Genève, nous pouvons faire vivre un forum continu où toutes les parties en cause peuvent s’exprimer. Nous sommes perçus, dans le monde, comme l’un des rares lieux où cette polyphonie a quelque chance de s’organiser. Nous n’avons ni le pouvoir de faire la guerre, ni d’arracher la paix, mais nous avons des cerveaux, des cœurs, des âmes, capables de s’ouvrir au vaste monde.

Dans les dernières années de la guerre d’Algérie, juste avant les accords d’Evian (1962), la Suisse romande a servi de plaque tournante à des négociateurs. J’ai étudié de très près cette période. Les émissaires français et ceux du Front de libération nationale (FLN) pouvaient, par notre truchement, entrer en contact. De même, depuis la révolution iranienne de 1979, la Suisse a permis de représenter des intérêts, là où les ponts étaient coupés. Nous sommes un tout petit pays, d’un poids stratégique mimine, mais nous sommes capables de jouer un grand rôle, dans les contacts entre antagonistes.

Humanisme, ouverture à l’autre

Et puis, il y a les antennes invisibles de chacune de nos âmes. Nous avons, dans notre pays, et notamment à Genève, des racines spirituelles, ancrées dans l’humanisme, la Réforme, l’ouverture à l’autre, qui ne nous amènent pas à une vision monolithique du monde. Dans la crise actuelle au Moyen-Orient, ne nous contentons pas du discours des Américains. Ouvrons-nous, aussi, à celui de la vieille Perse, sans la cantonner à un régime (celui en place depuis quarante et un ans), mais en tenant compte du rôle historique, culturel, géostratégique tenu par cette civilisation plusieurs fois millénaire, dans l’Orient compliqué.

La parole à tous

Renseignons-nous, chacun de nous dans sa responsabilité individuelle, sur la prodigieuse mosaïque linguistique, confessionnelle (y compris les grands courants internes à l’islam) qui constitue cette région du monde. Et surtout, donnons la parole à tous. Posons les enjeux. Lisons, encore et toujours, renseignons-nous. Ainsi, à notre modeste niveau, nous pourrons nous rendre utiles. C’est l’une des missions historiques de notre pays.