Réactionnaire? Et comment!

Pour la nation. Pour la souveraineté. Pour la qualité de la langue. Pour la culture. Et surtout, contre la tyrannie des «sujets de société». C’est réactionnaire? Eh bien, assumons!

  • Statue de la place de la République à Paris. «Je suis réactionnaire, mais je me bats

    Statue de la place de la République à Paris. «Je suis réactionnaire, mais je me bats pour une société républicaine.» 123RF

J’avais 10 ans en mai 1968, je me passionnais pour les événements, j’écoutais les radios, j’étais à fond pour le général de Gaulle, je peux dire que j’ai immédiatement haï ce mouvement. Je connais le poids des mots, j’assume ce verbe. J’en voulais férocement à mes aînés de s’en prendre à un homme que je percevais – sans pouvoir encore le formuler ainsi – comme un personnage de l’histoire. J’avais 10 ans, j’aimais ces années 1960, celles d’une enfance heureuse, dans une école exigeante mais passionnante, avec des camarades que j’appréciais, des cours d’histoire qui m’emportaient, des récitations de poèmes, devant toute la classe, que j’adorais. J’aimais le français, surtout la poésie, l’histoire, la géographie, la musique. Je peinais à comprendre les revendications de ces étudiants qui n’avaient, au fond, que six à douze ans de plus que moi.

Déjà de la génération d’après

Alors quoi, étais-je déjà vieux, avant même d’avoir éclos? C’est possible. Enfant, je n’étais pas attaché à l’enfance. Pas plus qu’adolescent, à l’adolescence. En clair, je me suis toujours refusé, toute ma vie, à une quelconque guerre de générations. J’aimais mes parents, ma famille. J’aimais l’école. J’aimais mes institutrices, mon prof de musique. Il me semblait que ce monde, qu’on nous léguait, n’avait rien à voir avec les images d’étouffement qui suintaient du discours des manifestants, sur les chaînes radio. Bref, j’étais déjà, par rapport aux soixante-huitards, de la génération d’après. A cela s’ajoute un penchant naturellement réactionnaire – pourquoi le nierais-je? – un attachement à la langue, à la structure de la phrase, à la connaissance de l’événement en histoire, à l’ordre républicain, qui me portent, en effet assez peu vers la vocifération de rue.

Suisse gaulliste

Oui, j’étais un enfant réactionnaire. Au fil des années, j’ai étudié le mouvement de Mai 68, j’ai compris la colère estudiantine contre un certain mandarinat universitaire tyrannique, saisi l’aspect sclérosé que pouvait présenter la société gaulliste de pouvoir, oui j’ai fait un bout de chemin. Mais jamais jusqu’à pardonner à ce mouvement d’avoir érigé les sujets de société au premier plan par rapport aux impératifs sociaux (légitimement défendus par le syndicat CGT et les communistes, retirés du jeu aussitôt signés les Accords de Grenelle), et surtout par rapport à la politique, la grande, celle que menait l’homme de l’histoire qui, en ce temps-là, menait la France.

Pour une société républicaine

Les années ont passé, les soixante-huitards ont vieilli, et moi avec eux. La violence de mon rejet, pourtant, n’est en rien apaisée par le temps. On le retrouve aujourd’hui, l’esprit de Mai 68, sous d’autres formes, les uns défendant le jargon inclusif, d’autres les sujets liés au genre, ou à la couleur de la peau. Dans ce jeu-là, je ne suis jamais entré. Je me bats pour une société républicaine, pour la justice sociale, pour une économie forte, pour les gens qui se lèvent le matin et vont bosser. Je me bats pour la souveraineté des nations, la démocratie directe, le rayonnement d’une école sûre de ses valeurs. Réactionnaire? Oui, si ça peut vous faire plaisir. Le mot ne me fait pas peur. Je l’assume, bien volontiers. Et vous embrasse, fraternellement.