Christian Dandrès, conseiller national socialiste: «Le locataire ne serait plus pleinement chez lui»
NON •
Pourquoi recommandez-vous de rejeter ces deux objets relatifs au droit du bail?
Les 2 lois faciliteraient les congés en supprimant de facto le droit de sous-louer et la protection contre les congés de représailles. Sous-louer tout ou partie d’un logement ou d’un local commercial est un droit soumis à conditions: obtenir le consentement du bailleur, ne pas faire de profit au détriment du sous-locataire, sous-louer pour une durée limitée (dans le cas d’une sous-location entière). Le bailleur ne peut pas refuser son consentement si ces conditions sont remplies, sauf inconvénient majeur. La loi changerait tout en prévoyant: 1) l’obligation d’obtenir le consentement du bailleur au préalable et par écrit. La violation de cette obligation purement formelle entraîne le congé. 2) Une extension à l’infini des motifs de refus du consentement. La seule condition serait le bon vouloir du bailleur.
Les partisans estiment que ce changement est nécessaire. Que leur répondez-vous?
Les bailleurs prétendent assurer la sécurité du droit, lutter contre Airbnb et protéger le sous-locataire. Concernant la sécurité du droit, c’est tout le contraire. Il ne serait plus possible de savoir, avant d’avoir eu la réponse du bailleur, si une sous-location est possible ou non. Quant à la protection contre les abus, les bailleurs pratiquent des loyers abusifs à large échelle, mais voudraient protéger le sous-locataire. Quel cynisme! Qu’arrive-t-il lorsqu’un un bail est résilié? Le logement est reloué, en principe jamais au sous-locataire, à un loyer hyper abusif. Concernant Airbnb, la loi interdit déjà de transformer un logement en appart-hôtel. Cette protection a été gagnée par l’Asloca contre les milieux immobiliers, parce que Airbnb concerne surtout des propriétaires. Enfin, ce que les bailleurs ne disent pas, c’est que leur loi vaut pour la sous-location partielle et les locaux commerciaux. Il est aujourd’hui possible de sous-louer une partie d’un logement sans limite de temps, par exemple dans le cadre d’une colocation ou à un proche comme un enfant majeur ayant terminé sa formation et payant un loyer pour sa chambre. Avec ces lois, cela ne serait plus possible si tel est le bon vouloir du bailleur. De même, le bailleur pourrait selon son bon désir refuser à une entreprise de sous-louer une partie du local à sa propre filiale.
Face à une pénurie de logements, ces nouvelles règles ne risquent-elles pas d’aggraver la situation?
Ces 2 lois ne visent pas à protéger les locataires ou les sous-locataires, mais à faciliter les congés. Elles menacent des milliers de locataires. Les bailleurs pourraient contrôler chaque grand moment de la vie de son locataire, professionnelle, affective, des affaires. Le locataire ne serait plus pleinement chez lui, mais devrait toujours compter avec l’intervention du bailleur. Voulons-nous donner ce pouvoir supplémentaire aux bailleurs? N’en ont-ils pas déjà assez?