
SANTÉ - En médecine, l’usage de casques qui plongent le patient dans une réalité virtuelle tend à se généraliser. Cette pratique dérivée de la traditionnelle hypnose, permet d’obtenir d’excellents résultats en termes de réduction du stress et de la douleur durant les gestes opératoires.
Sous vos yeux, un magnifique paysage de montagne dévoile ses attraits, sous un soleil éclatant. Alors que sur votre droite, des vaches paissent paisiblement, des enfants jouent sur votre gauche. En levant la tête, c’est une magnifique montgolfière, que vous voyez lentement s’élever dans le ciel...
Vous pensez être dans une superbe station de montagne des Alpes suisses? Pas du tout! Vous êtes en réalité dans un cabinet médical ou même carrément à l’intérieur d’un bloc opératoire. Est-ce que vous voyez et entendez, n’est en vérité rien d’autre qu’une expérience d’immersion obtenue grâce au casque de réalité virtuelle que vous avez enfourché sur votre nez.
Engouement croissant
Depuis des années, en effet, le recours à l’hypnose tend à se multiplier en médecine, et particulièrement lors d’actes chirurgicaux nécessitant une anesthésie, qu’elle soit locale, locorégionale (rachidienne ou péridurale), ou générale. Le procédé n’est pas nouveau, mais avec l’arrivée de la réalité virtuelle, il connaît actuellement un engouement croissant et la technique est par exemple déjà utilisée à la Clinique de Genolier depuis plusieurs années.
Car ce que l’on appelle l’hypnosédation par immersion virtuelle présente en effet de très nombreux avantages. Grâce à elle, le patient est moins stressé, il ressent moins de douleurs, aura besoin de moins de médicaments, qu’il s’agisse d’antidouleurs ou de molécules utilisées pour l’anesthésier. Ensuite, il récupérera plus rapidement, et avec moins d’effets secondaires.
Univers visuel et sonore
Mais comment cela fonctionne-t-il exactement? Les casques de réalité virtuelle, utilisés en général avant et/ou pendant l’intervention, permettent de plonger le patient dans une autre réalité, qu’il s’agisse donc d’un paysage de montagne, d’un océan ou de toute autre scène, et en plus avec la bande-son de son choix. Le patient a ainsi la liberté de choisir l’univers visuel et la musique qui lui conviennent et l’apaisent, parfois avec des textes lus par des professionnels, ce qui a pour effet de le plonger plus facilement dans un état de semi-conscience.
Cette démarche lui permet ainsi de se déconnecter du monde qui l’entoure et de modifier sa perception de la douleur ou du stress, grâce à l’effet de diversion obtenu à la faveur de l’immersion, qui le détourne en quelque sorte des préoccupations et des sensations qui peuvent l’obséder.
La séance se déroule en trois phases, une phase d’introduction-induction, une phase d’immersion proprement dite et de durée variable selon les besoins du médecin et puis enfin une courte phase de sortie d’immersion qui se doit d’être progressive pour éviter d’éventuels effets indésirables comme des nausées.
Suggestibilité variable
Évidemment, cette innovation thérapeutique ne convient pas à tout le monde: certains patients ne sont pas du tout suggestibles, d’autres le sont modérément et d’autres enfin sont hautement suggestibles et c’est bien sûr chez eux que l’on observe les meilleurs résultats en termes de perception de la douleur, mais aussi de diminution du nombre et de la durée des médicaments auxquels on a eu recours. Fort logiquement, les enfants sont à ce titre particulièrement suggestibles et de fait la pédiatrie est l’une des spécialités médicales qui, dans sa pratique quotidienne, a le plus amplement recours à l’hypnose et aux casques de réalité virtuelle.
Pour la médecine enfin, l’usage de ces dispositifs présente un bénéfice évident. Ils permettent en effet d’avoir moins recours aux hypnothérapeutes souvent peu disponibles et dont les prestations ne sont pas toujours remboursées. Ils ont enfin l’avantage de permettre de gérer simultanément plusieurs patients, là où l’hypnose traditionnelle requiert la présence d’un thérapeute par malade.
L’avis de la spécialiste: Dr Dorota Teterycz
Spécialiste FMH en chirurgie générale et viscérale.
L’hypnose par réalité virtuelle est-elle efficace?
De nombreuses études attestent de son efficacité. La recherche médicale a ainsi pu démontrer une diminution de la perception de la douleur et de l’interférence, de la douleur et de l’anxiété durant les interventions chirurgicales grâce à elle. Et la réalité virtuelle y ajoute un effet d’immersion non négligeable. Évidemment, cette efficacité dépend beaucoup du niveau de suggestibilité de chaque patient.
Quel est son intérêt?
Avant l’intervention, elle permet de préparer psychologiquement le patient pour le familiariser avec l’environnement de la salle d’opération, de lui expliquer le déroulement de l’intervention et de réduire sa peur de l’inconnu. En outre, cette préparation diminue l’impact de l’anxiété sur la douleur pendant et après l’opération, l’hypnose thérapeutique étant également utile une fois la douleur installée. Elle aide à moduler sa perception en travaillant sur son observation et son acceptation. L’objectif est de diminuer la douleur perçue et d’augmenter la capacité du patient à y faire face.
Le recours aux casques est-il donc appelé à se généraliser?
C’est une prestation qui pour l’instant ne peut pas être facturée de manière spécifique au patient. Les médecins, cliniques et hôpitaux prennent donc en charge l’acquisition du matériel mais cela reste un frein à sa généralisation alors que ses bénéfices sont utiles et évidents.