A Penthes, des meubles vendus sans l’accord des propriétaires?

Rédigé par
Tadeusz Roth
Genève

TRANSACTIONS • Un Genevois reproche  à l’Office des faillites d’avoir permis la vente  de ses meubles  sans l’informer. 

«Les meubles que la Fondation pour l’histoire des Suisses dans le monde m’avait proposé de prendre en dépôt contre inventaire dans les années 1980 ont terminé aux enchères. Ils ont été vendus au bénéfice des créanciers et de l’Office des faillites, sans l’assurance que tous les propriétaires des meubles ou objets en dépôts aient été contactés.» Voilà la conclusion à laquelle est arrivé Philippe*, en découvrant les difficultés auxquelles fait face le château de Penthes (lire notre édition du 24 octobre 2024).  
Après quelques recherches, l’homme constate que ses meubles – estimés 3150 francs – ont été vendus par la maison Piguet, elle-même mandatée par l’Office des faillites. Pourtant, la réponse de la maison de vente est loin de le satisfaire. «On m’a indiqué qu’effectivement, l’Office et la maison Piguet savaient qu’il y avait des objets en prêt… Mais que la qualité de l’inventaire ne permettait pas de prendre contact avec les propriétaires. Par contre, la maison Piguet édite des catalogues exemplaires dans lesquels j’ai pu retrouver mes meubles!», s’énerve le collectionneur. 
«Désintérêt» 
Qui se tourne alors vers l’Office des faillites pour obtenir des réponses. Ici aussi, il déchante rapidement. «Le son de cloche est tout aussi désintéressé, on se couvre par la loi qui indique bien qu’il était de mon devoir de lire les avis officiels et de produire les preuves… qu’ils avaient déjà certainement sous les yeux ou dans quelques cartons. Manque de chance, je ne suis pas un lecteur de ce genre de littérature et je passe beaucoup de temps hors de Suisse, sur mon bateau, je n’avais donc aucune chance de savoir que la Fondation occupant le château était en faillite et qu’il me fallait réagir. Nul ne doit ignorer la loi! C’est très pratique, car cela permet à l’Etat de se gausser d’un résultat de vente exceptionnel (d’environ 1,5 million de francs), et tout ça sur le dos de donateurs ou de déposants parfaitement honnêtes, qui finissent malheureusement grugés par le travail sans faille de l’Office des faillites», déplore Philippe. 
Interrogations 
Le Genevois ne comprend pas comment il est possible de vendre des lots d’objets anciens alors qu’ils n’appartiennent pas à la Fondation en faillite: «Comment peut-on se féliciter du résultat d’une vente alors que l’on sait que certains objets mis en vente n’appartenaient pas à la Fondation en faillite mais à des privés dont on a sans doute la liste, mais qui est trop opaque pour qu’on prenne la peine de la lire ou d’y mettre de l’ordre?» .
«Propriété de par la loi»
Du côté du Département des finances, dont dépend notamment l’Office des faillites, on confirme que la collection en question a bien été vendue aux enchères par la maison Piguet. Mais le propriétaire a-t-il été averti? «Selon la loi qui régit les faillites, les procédures de faillites sont communiquées par voie de publication, généralement dans la Feuille d'avis officielle. C'est par ce moyen que les tiers ayant des droits à faire valoir ou des biens à récupérer doivent s'informer. Dans le cas présent, l'information a également été largement relayée par la presse qui a fait état du dépôt de bilan de la Fondation pour l'histoire des Suisses dans le monde», répond Tatiana Oddo Clerc, secrétaire générale adjointe chargée de communication pour le Département.  En clair, c’était bien à Philippe de se tenir au courant. 
«Faute d'une revendication valablement annoncée et dûment justifiée par pièces, les biens en possession de la Fondation sont présumés être sa propriété de par la loi. L'office a exécuté la mission complexe qui lui a été confiée par le Tribunal de première instance dans le respect de la loi et en tenant compte du mieux qu'il le pouvait du caractère extraordinaire de ce dossier qui consistait, notamment, à liquider un musée», conclut le Département. 

 

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