
FORMATION • Des collaborateurs dénoncent un manque de place de stage et une croissance du nombre d’élèves sans contrepartie suffisante. L’institution promet du changement.
«Un paradoxe dont nous allons subir les conséquences demain, si ce n’est déjà aujourd’hui, et que les étudiants vont subir plus que nous (...)». Voilà ce que redoutent certaines voix à la Haute école de travail social (HETS) a appris GHI. En cause? La difficulté pour l’institution à répondre à la pénurie actuelle de professionnels dans le social, situation à l’origine d’un climat particulièrement tendu.
Pour les collaborateurs, le constat peut être amer, eux qui déplorent également une pénurie de places en stage, qui sévirait déjà pour la volée actuellement en première année. «A la rentrée d’automne 2025, le risque que ces étudiants n’aient pas de place de stage est grand et réel. Sans stage, la formation ne peut continuer. Et il n’y a à ce jour aucune solution à cette problématique.» A ce premier problème, s’ajoute l’augmentation des effectifs étudiants, une quinzaine de plus par année par rapport à l’année précédente. «Cela signifie que, dans un contexte de pénurie de places en formation pratique, le nombre d’étudiants va augmenter malgré tout. L’école est sommée d’accueillir toujours un plus grand nombre d’étudiants sans avoir aucune garantie de pouvoir les former jusqu’au bout», déplore un encadrant.
Mais ce n’est pas tout. D’après notre interlocuteur, l’HETS serait également en proie à une tension grandissante au sein des équipes, notamment depuis le changement de direction. Enfin, la question des restrictions budgétaires est également pointée du doigt: «Elles produisent une nécessité de s’adapter à toujours plus avec beaucoup moins. Cette situation impacte les enseignants et le personnel administratif, ce qui se répercute sur les étudiants qui sont moins bien formés pour faire face aux exigences du terrain, lequel requiert des professionnels qualifiés et sensibles.»
Pénurie
La HETS reconnaît une situation difficile. Mais pour l’institution, la cause est avant tout liée à la pénurie qui frappe toute la branche et contraint les différents acteurs à trouver des solutions. «Il y a une tension forte sur le marché du travail, qui met notre école sous pression. C’est à cela qu’a répondu le comité gouvernemental en augmentant les quotas. Notre objectif consiste avant tout à répondre à cette pénurie qui menace tout le tissu social genevois», répond le directeur de la HETS, Jean-Félix Savary.
Un directeur qui se veut optimiste, assurant que des discussions, pas toujours faciles, sont actuellement menées. «Cela fait plus d’un an mettons en place des solutions comme ouvrir des salles supplémentaires et engager de nouveaux enseignants. Une tâche chronophage qu’il faut effectuer tout en maintenant le niveau de notre Bachelor», détaille le directeur.
Plus largement, l’institution pointe une complexification de la profession. «Aujourd’hui, les besoins sont de plus en plus variés. Si on ne répond pas correctement à ce défi, le risque serait d’envoyer sur le terrain des gens pas assez formés. Il en va de la mission de la cohésion sociale», assure Jean-Félix Savary. Finalement, le directeur relève que malgré les craintes de certains collaborateurs, tout le monde souhaite la même chose: répondre à la pénurie actuelle.
Magistrate informée
Contacté, le Département de l’instruction publique (DIP) rappelle que la Haute école spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO) est une entité autonome. Cependant la chef du Département de l’instruction, Anne Hiltpold suit ce dossier: «La magistrate a été informée que certains membres du personnel avaient émis des inquiétudes.» Mais comment répondre à la pénurie de travailleurs sociaux? Le DIP avance quelques pistes, notamment: «en augmentant le nombre de places de formation» ou encore «en essayant d’attirer les jeunes à s’inscrire dans une formation de métiers en tension».
Des mesures qui nécessitent de nouveaux moyens? «Ces moyens ont été obtenus par Genève dans le cadre des discussions relatives au PFD (plan financier de développement) entre les membres du comité gouvernemental de la HES-SO (5 conseillères et conseillers d'Etat des cantons membres de la HES-SO). Cette hausse de quota de la filière s'est accompagnée de plus de moyens donnés par les cantons dans le budget de la HES-SO».