Genève assure le couvert aux écoliers du primaire. Mais les élèves du Cycle d’orientation compteraient-ils pour du beurre? Privés de cantines scolaires, ils se laissent souvent tenter par des encas labellisés malbouffe qu’ils expédient en deux coups de cuillère à pot.
Certes, quelques établissements ont trouvé des pis-aller. Mais ces initiatives ne constituent pas la règle. Loin s’en faut. Le député socialiste, Romain de Sainte Marie, vient de déposer un projet de loi. Lequel demande que chaque enfant bénéficie d’un repas qualitatif à un prix abordable et dispose d’un lieu d’accueil surveillé.
Comment ça marche?
Pour les établissements primaires, ce sont les communes qui sont à la manœuvre via le Groupement intercommunal pour l’animation parascolaire (GIAP). Chaque jour, un repas diversifié et équilibré est servi , et la majorité des restaurants scolaires sont estampillés Fourchette verte. Et ensuite? C’est le grand saut pour les élèves qui entrent au Cycle d’orientation. «Soit, certaines directions d’établissement ont opté pour la livraison de repas. D’autres proposent une petite carte ou orientent les ados vers des restaurants collectifs proches. Dans quelques CO encore, du personnel volontaire cuisine sur place», relève Romain de Sainte Marie.
Et dans tous les autres cycles? «Selon les données qui m’ont été transmises en décembre 2023, dans les CO de l’Aubépine, de la Gradelle, des Grandes-Communes, du Marais, de Cayla et des Colombières, un espace équipé d’un micro-ondes est à la disposition des jeunes gens», détaille le député.
Maladies cardiovasculaires
Un état des lieux que de nombreux parents jugent lacunaire. «Le changement est abrupt. Les enfants – ils ont 11 à 12 ans au début du Secondaire I – doivent en effet déjà intégrer un programme scolaire exigeant, notamment en termes de responsabilisation. Alors, il n’est pas normal que ceux dont les parents travaillent, soient contraints de bricoler leur casse-croûte. Ce d’autant qu’à cet âge-là, entre une assiette de légumes et un encas bien gras, leur choix se porte rapidement sur la seconde option», témoigne un père de famille.
Et c’est bien sur ce constat que l’élu rose fonde son projet de loi. «La nutrition est un véritable enjeu de santé publique», dit-il. Il est essentiel de promouvoir une alimentation équilibrée qui réduise notamment les apports en sucres et graisses.»
S’adossant aux études de l’Office fédéral de la santé (OFS), il rappelle que l’obésité représente un facteur de risque pour un grand nombre de pathologies.
Messages préventifs
Alors? Le Département de l’instruction publique (DIP) multiplie les campagnes de sensibilisation à des collations saines à la récréation. Il promeut aussi l’action de la fondation Senso5. Laquelle développe des programmes favorisant un rapport sain à l’alimentation pour les enfants de la scolarité obligatoire (ainsi que pour les seniors).
Mais alors, si chacun tire à la même corde, où est le nœud? Autrement dit pourquoi la totalité des CO ne sont-ils pas équipés de cuisines scolaires?
Sollicité, via une question écrite, le Conseil d’Etat avait alors répondu que: «Si des prestations de restauration ne sont pas proposées systématiquement dans tous les cycles d’orientation c’est que la demande est très faible par rapport à la taille des établissements. Les élèves, dont le désir d’autonomie est marqué à cet âge, préfèrent durant la pause de midi, quitter l’école et rentrer à la maison ou bien se rendre dans les grandes surfaces.»
Cette réponse de l’Exécutif cantonal fait monter la moutarde au nez du député. «Elle reflète une passivité terrible de la part du gouvernement face à la problématique. A quoi bon sensibiliser les jeunes à la nécessité de se nourrir sainement si l’offre de restauration ne correspond pas au message censé être véhiculé.»
Sociabilisation
Au-delà, le parlementaire genevois considère que partager des repas au sein d’un restaurant scolaire représente des moments propices à la sociabilisation et donc à la cohésion.
Le texte, qui sera traité dans l’hémicycle, requiert donc une modification de la Loi sur l’accueil à journée continue (LAJC). L’Etat disposerait alors de 5 ans pour se mettre en conformité avec la nouvelle loi.
Acquis à la cause, le DIP rappelle que plusieurs projets pilotes ont déjà été menés. «Nous souhaitons pouvoir proposer des dispositifs dans tous les cycles avec les contraintes budgétaires que nous connaissons. Mais nous gardons aussi en tête que si les parents veulent des options de restauration saine, les élèves préfèrent souvent manger chez eux ou à l’extérieur de l’école.»