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Science et alimentation: combien de temps un moratoire est-il censé durer?

Rédigé par
Vincent Simon
Société

Fin janvier, le Conseil fédéral a proposé de prolonger de cinq ans le moratoire sur le génie génétique dans l’alimentation. Une commission parlementaire avait fait la demande d’une prolongation de deux ans, jusqu’en 2027, le temps de traiter un projet visant à autoriser de nouvelles techniques. Le gouvernement a décidé d’aller jusqu’en 2030. 

Cela signifie qu’aucune autorisation ne peut être accordée pour l’utilisation de plantes génétiquement modifiées (OGM) à des fins agricoles, horticoles ou forestières. Ces organismes ne peuvent faire l’objet que de recherche scientifique. Ce moratoire devait initialement durer jusqu’en 2010, soit cinq ans après l’acceptation de l’initiative «pour des aliments produits sans manipulations génétiques».

Dans l’idée des citoyens qui ont accepté l’initiative à l’époque, il y avait probablement la volonté de prendre un peu de recul et d’évaluer les éventuels problèmes que les OGM peuvent poser. Le Comité d’initiative expliquait lui-même qu’une « production sans OGM sur tout le territoire représente une chance évidente pour l’agriculture d’afficher clairement sa qualité sur le marché suisse et étranger ». Vingt ans, cela fait un long moment de réflexion ! 

Risques faibles

N’a-t-on rien appris au cours de ces dernières années ? Pourtant si : d’une part, le Fonds national de la recherche a constaté en 2012 que « les risques que représente le génie génétique dans l’agriculture en Suisse sont faibles et que le potentiel de cette biotechnologie n’est pas utilisé ». Onze projets ont analysé les possibles risques environnementaux du blé, du maïs ou des fraises transgéniques. Ils n’ont pas permis de constater des effets négatifs sur les insectes utiles, les microorganismes ou la fertilité des sols.  Malgré ces résultats encourageants, l’interdiction a été maintenue.

De nouvelles techniques sont aussi apparues : contrairement aux premiers OGM, on sait aujourd’hui modifier les gènes de plantes (mutagenèse) sans les croiser avec des gènes étrangers de plantes ou d’animaux (transgenèse). Ces techniques devraient rassurer et permettre une levée des interdictions. Le Conseil fédéral lui-même l’envisage depuis plusieurs années. Mais aujourd’hui, il n’a pas encore livré de projet de modification de la loi et il prolonge encore le moratoire. 

Nouvelles technologies

On peut très bien vivre sans OGM, c’est un fait, et même si l’on en consomme en grandes quantités et sans s’en porter plus mal lorsque l’on passe ses vacances hors d’Europe. Mais il serait sage donner une chance aux nouvelles techniques. Celles-ci permettent, bien plus rapidement que les techniques traditionnelles, de produire par exemple des semences résistantes au changement climatique et nécessitant moins d’engrais ou de pesticides. Nous avons en Suisse la capacité d’innovation et les codes moraux nous permettant d’exploiter le progrès technique. Il est dommage de s’en tenir éloigné.

 

Vincent Simon
Responsable de projets

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