Stationnement: "Nous ne tolérons aucune incivilité contre nos agents"

Rédigé par
Adélita Genoud
Genève

 A la manœuvre depuis 2009 pour le contrôle du stationnement en Ville de Genève, à Carouge et à Satigny, la Fondation des parkings voit rouge. Trop d’agents sont brutalisés, menacés ou injuriés par des usagers de la route mécontents d’avoir été collés. La direction générale de l’établissement public autonome a décidé d’appliquer la tolérance zéro pour protéger son personnel. Tout acte répréhensible sera poursuivi en justice. Rencontre avec Damien Zuber, directeur de la Fondation des parkings.

GHI: En quinze ans, qu’est-ce qui a fondamentalement changé dans l’exercice de votre mission? 
Damien Zuber: La technologie ,de toute évidence: nos services sont dotés de scan cars, des voitures qui sillonnent la ville, pour repérer les véhicules contrevenants. Le matériel en main des agents est en outre à la fois plus léger et plus rapide. Il est aussi plus performant. Les erreurs sont quasi impossibles, ce d’autant que chaque intervention est photographiée. Et les images peuvent être consultées en ligne.

En automne 2023, nous avions relaté dans les colonnes de GHI, le cas d’une collaboratrice menacée des pires outrages par un automobiliste. Constatez-vous une montée inquiétante de la violence? 
Oui, les insultes, les menaces, les gestes obscènes et parfois aussi les agressions physiques sont à la hausse. Et puis, on assiste aussi aujourd’hui beaucoup plus qu’hier à un dénigrement de la fonction. Il n’est pas rare qu’un agent se fasse invectiver par un usager non concerné par le contrôle ou la verbalisation. Je crois que cette absence de respect se vérifie pour l’ensemble des pouvoirs publics dont nos agents sont aussi les représentants.

Comment expliquer ce phénomène? 
Il est évidemment multifactoriel. Je crois que les usagers sont sous pression, certains rencontrent des difficultés financières.

Le personnel agressé ose-t-il toujours alerter sa hiérarchie voire déposer plainte? 
Nous sensibilisons nos agents à la nécessité de ne tolérer aucun débordement. Nous les accompagnons lorsqu’ils déposent plainte. Nous mandatons un avocat pour représenter et assister l’agent aux audiences du tribunal. A Genève, la justice s’exerce systématiquement. Chaque cas soumis est traité. Dans la très grande majorité, la plainte aboutit à une condamnation de l’auteur.

Le nombre de places de stationnement se réduit comme peau de chagrin. Les motards et les automobilistes qui cherchent longuement un espace où stationner sont logiquement plus excédés. Est-ce un paramètre dont vous tenez compte? 
La mission de la Fondation des parkings est de faire respecter les règles de stationnement sur la voie publique ainsi que de créer des places de stationnement en ouvrage afin d’améliorer la vie des Genevois. L’accent mis aujourd’hui sur les cases de livraison – elles ne sont autorisées que pour le chargement et déchargement de biens et de personnes – évite bon nombre de problèmes. Tout d’abord, les professionnels peuvent mieux les utiliser (20 minutes avec possibilité d’allongement de la durée). Ensuite, cela évite que ces convois qui transportent du matériel lourd et encombrant ne se garent sur les trottoirs. Ce qui pourrait mettre en danger ou entraver le passage des personnes à mobilité réduite ou des enfants contraints d’emprunter la chaussée.

Aucun agent ne fait d’excès de zèle? 
Non. Ceux qui nous accusent de le faire reconnaissent, preuve à l’appui, qu’ils sont en faute mais ils se défaussent en arguant que leur véhicule ne gêne personne.

Et si un agent se montre irrespectueux? 
Nos collaborateurs savent qu’ils ont un vrai engagement de service public. Le cas échéant, et c’est déjà arrivé, nous sanctionnons l’agent en faute.

Une large part des Genevois est convaincue que vos collaborateurs perçoivent une prime au prorata du nombre d’amendes infligées. Info ou intox? 
Faux, bien sûr. Nous ne pratiquons pas le salaire au mérite. Pour le surplus, nous n’avons pas d’objectifs en termes de volume d’amendes.

Injures: les femmes aux premières loges

Chef de poste des Tulipiers depuis huit ans, Pierre Susini, l’affirme:  «les injures contre la fonction ont pris l’ascenseur. Et dans 10% des cas, nous sommes confrontés à des agressions physiques». Les femmes font régulièrement l’objet d’insultes sexistes. Alors? les agents qui le souhaitent peuvent travailler en binôme. «La formation dispensée à chaque recrue porte aussi sur l’identification d’un conflit latent, la présence d’un agresseur potentiel, la manière de désamorcer une crise. Nous recourons à des spécialistes externes», relève Pierre Susini. Pour l’agent expérimenté, le comportement des usagers de la route a, sans équivoque, changé. «Ils viennent plus souvent au contact, tutoient, deviennent rapidement agressifs. Mais ce qui faisait autrefois partie du métier n’est plus accepté et nous encourageons le personnel à exposer les situations conflictuelles afin de prendre les mesures adéquates.» 

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