
Témoignage • Menotté et emprisonné sans raison à la frontière américaine, un Romand résident au Canada raconte son calvaire.
Incarcéré durant plus de dix heures, ce Romand résidant au Canada depuis cinq ans, raconte l’épreuve et l’humiliation qu’il a vécues, en raison du comportement hostile des douaniers US.
Voilà qui pourrait ressembler au scénario d’une (mauvaise) série américaine. Il y a quelques semaines, Mario*, un jeune Romand de 28 ans, légalement établi au Canada depuis 5 ans pour y étudier et y travailler, décide de se rendre par la route à New York, afin d’y passer un week-end de tourisme. Quoiqu’habitué à se rendre aux Etats-Unis, il prend néanmoins soin de se munir de son passeport suisse, de son visa de travail canadien, de sa réservation d’hôtel, de son ESTA valide (autorisation de voyage électronique) et même… de son avis d’imposition canadien.
C’est donc l’esprit serein qu’il se présente au poste frontière au volant de son véhicule qui arbore fièrement des plaques québécoises. Et c’est là que ce qui s’annonçait comme un agréable week-end de farniente vire tout simplement au cauchemar.
Surréaliste
Contrôlé par deux gardes-frontières américains, il est mis de côté, menotté puis embarqué à l’intérieur du poste pour être minutieusement interrogé pendant… dix heures.
« C’était à proprement parler surréaliste raconte-t-il. J’ai été traité littéralement comme un criminel. Mon téléphone portable et mon ordinateur ont été minutieusement fouillés. On me posait des questions du genre: pourquoi avez-vous telle photo? Pourquoi telle personne est-elle votre amie sur les réseaux sociaux? Pourquoi êtes-vous allé à tel endroit?».
Et d’ajouter: «à un moment, l’un des deux douaniers, crâne rasé et tatouages d’araignées omniprésents m’a lancé: Little boy tu es mal parti et vraiment dans une sale position, si tu mens ou que l'on trouve quelque chose, c’est le bus pénitentiaire qui t'attend.»
Le DFAE «préoccupé»
Manque de «chance», les douaniers ne trouvent évidemment rien. Estimant que Mario était incapable de prouver qu’il ne souhaitait pas s’installer aux Etats-Unis, ils le refoulent néanmoins, au bout de dix heures de détention, vers le Canada, où les gardes-frontières l’informent qu’ils sont désormais malheureusement coutumiers de ce genre de situation. Pire encore, son autorisation de voyage électronique ESTA est purement et simplement annulée, et il devra désormais solliciter un visa s’il désire un jour, ce qu’à Dieu ne plaise, se rendre à nouveau aux USA.
Contacté, le Département fédéral des affaires étrangères suisse, le DFAE, précise: «Le DFAE a connaissance du cas d'une autre ressortissante suisse à qui l'entrée aux Etats-Unis a été refusée. Le DFAE est en contact avec la ressortissante suisse concernée. Lors d'une rencontre avec le chargé d'affaires ad intérim des Etats-Unis à Berne, le chef de la division Amérique du DFAE a fait part de ses préoccupations concernant le traitement réservé aux voyageurs entrant aux Etats-Unis.»
Alors que pour l’heure, la page de «Conseils pour les voyages aux Etats-Unis» du site Internet du DFAE ne mentionne aucune mise en garde en lien avec l’évolution actuelle de la situation aux frontières américaines, – de nombreux autres ressortissants européens ont vécu des mésaventures similaires –, Mario tient quant à lui à avertir: «Je suis vraiment très traumatisé par cette expérience qui était en outre particulièrement humiliante. Il faut vraiment que les Suisses soient conscients de ce qui peut leur arriver en voulant entrer dans ce pays.
* Prénom fictif, le témoin ayant évidemment souhaité conserver l’anonymat.