Hausse des jetons de présence en Ville de Genève, il faudra voter!

Rédigé par
Adélita Genoud
Genève

RÉFÉRENDUM • Les nouveaux conseillers municipaux  de la Ville de Genève bénéficieront-ils d’un relèvement  de leur rémunération? Pas dit!

Passé presque inaperçu, le référendum lancé contre la revalorisation de 25% des jetons de présences versés aux conseillers municipaux de la Ville de Genève a abouti. Et plutôt deux fois qu’une. A la fin juillet déjà, 3000 signatures avaient été récoltées (2500 sont nécessaires). Pour les initiants, Simon Brandt du parti Libertés et Justice sociale et Philippe Oberson candidat du «Peuple d’abord» à l’élection partielle du Conseil d’Etat, c’est un succès sans précédent. Interview à deux voix.

GHI: Pouvez-vous rappeler ce qui a suscité cette levée de boucliers de la part de votre parti et de la formation de Philippe Oberson? 
Simon Brandt: La première décision du nouveau Conseil municipal a été d’augmenter sa propre rémunération de 25%, ce qui représente un montant de plus de 500’000 francs annuels. Joli signal de la part d’élus dont la priorité devrait être d’améliorer le bien-être de la population avant le leur. Une heure de séance de commission serait ainsi rémunérée 137.50 francs plutôt que 110 qui est déjà très confortable. Ceci fait que les conseillers municipaux de la Ville de Genève seraient mieux rémunérés que les députés pour des prérogatives moindres. L’autre problème est le financement des partis politiques qui passe de 40’000 à 50’000 francs annuels, là aussi aux frais du contribuable. L’argent doit aller pour améliorer la qualité de la vie de la population plutôt que de la classe politique. Raison pour laquelle j’ai toujours refusé de voter toute hausse des jetons de présence ces dernières législatures. 

En quoi cela vous semble-t-il choquant, sachant que ces montants n’ont pas été revus à la hausse depuis 2011? 
Philippe Oberson: C’est surtout l’augmentation de 25% qui est choquante. Si elle avait été de 5% pour, par exemple, correspondre à l’inflation on aurait pu discuter de son bien-fondé. Qui parmi la population peut se targuer d’une hausse de 25% de son salaire depuis 2011 ? Personne. Ce qui prouve bien à quel point cette proposition est déconnectée de la réalité. On ne fait pas de la politique pour gagner de l’argent mais pour se mettre au service de la Cité. Et si des élus veulent gagner davantage, ils peuvent diminuer la rétrocession à leur parti jusqu’à 75% qui est l’une des raisons cachées de cette hausse. Il est surprenant que la presse ne s’intéresse pas davantage à cette forme de financement des partis politiques à travers l’argent du contribuable.

Comment expliquez-vous le succès de cette récolte de signatures ? 
Simon Brandt: Tout d’abord par la motivation et l’engagement de Philippe Oberson ainsi que de deux militants de LJS qui n’ont pas compté leurs heures pour récolter bénévolement des signatures plutôt que partir en vacances. Ensuite parce que personne ne comprend la raison d’une telle hausse dans le grand public. Comment demander des efforts à la population et à la fonction publique et se voter dans le même temps une hausse de sa propre rémunération? Il n’y avait quasiment pas besoin de convaincre les gens qui ont ainsi signé en masse ce référendum. J’invite cependant vos lecteurs à aller lire le PRD-383 qui détaille le montant des différents jetons de présence et indemnités des élus municipaux.

Les conseillers municipaux arguent d’un surcroît de travail justifiant la revalorisation de leur rémunération. Quel est votre avis? 
Philippe Oberson: Je ne vois pas de quel surcroît de travail ils parlent. C’est surtout un prétexte pour justifier cette augmentation aussi injustifiée qu’exagérée. Et comme le dit Simon Brandt, ils se retrouvent à être mieux payés que les députés pour des prérogatives moindres. Et le pire c’est que pour voter et débattre de cette hausse, ils ont touché des jetons de présence. On marche vraiment sur la tête. Il suffit aussi de voir dans quel état est la Ville de Genève pour voir que les élus ne font pas bien leur travail et ne méritent pas une telle hausse. Je pense notamment à la passerelle du Mont-Blanc qui était soutenue par une large majorité de la classe politique mais qui a été refusée en votation suite au référendum que j’avais lancé avec d’autres. C’est donc mon deuxième référendum.

Si le référendum est accepté par les Genevois, allez-vous vous pencher sur les jetons de présences attribués aux députés du Grand Conseil (160 fr. pour les séances plénières et 110 fr. pour les commissions? 
Simon Brandt : Sur le montant actuel non. Mais si une augmentation injustifiée devait être décidée dans le futur, et c’est aussi valable pour les salaires des membres d’exécutifs, nous n’hésiterons pas à lancer de nouveau un référendum afin que la population décide. A ce sujet, pour éviter que ce soit la classe politique qui décide elle-même du montant de sa rémunération, LJS pourrait ainsi déposer un projet de loi demandant un référendum obligatoire lors de hausses futures.

Des signatures en masse

Marie Vendrell et Benoît Salamin, militants de Libertés et Justice Sociale (LJS), Stéphane Oberson Le Peuple d’abord (LPA) ont récolté des signatures. Témoignages.
«Lorsque nous avons commencé à récolter des signatures pour ce référendum, nous avons été surpris de l’excellent accueil reçu auprès de la population qui l’a signé en masse. Nous avons, par exemple, même eu une conseillère municipale qui a signé le référendum en disant qu’elle avait honte de cette hausse mais qu’elle n’avait pas pu voter contre en raison de son parti. Et ce n’est qu’un exemple parmi les nombreux témoignages reçus
Surtout, nous avons été très surpris du peu de réactions des médias et de la classe politique suite au vote de cette hausse de 25%. On a voulu faire passer comme normal et justifié quelque chose qui ne l’est pas. En nous mobilisant, nous avons voulu aussi montrer qu’on peut faire de la politique par vocation et non par vénalité. Et nous attendons avec confiance la votation future car nul parmi les personnes approchées n’a été convaincu par cette hausse.»

En savoir plus