Le domaine du père de Titeuf sera-t-il racheté par la Ville?

Rédigé par
Tadeusz Roth
Genève

PATRIMOINE • Mise en vente par le dessinateur pour une vingtaine de millions de francs, la propriété située au bord du Rhône déchaîne les passions.

Une classe politique qui se déchire. Voilà le résultat de la mise en vente de la maison de Zep, Philippe Chappuis dans le civil, le célèbre dessinateur genevois. Une bâtisse du 18e siècle, trônant au milieu d’un vaste terrain, la Campagne-Masset, que Zep serait d’accord de vendre à la collectivité pour 21,5 millions de francs. Une somme bien en dessous des 25 millions demandés dans un premier temps. 
Sur le papier, le projet a effectivement de quoi séduire, dans un quartier en proie à la densification et où les espaces verts se raréfient. Lors des débats particulièrement échaudés du Municipal, la plupart des arguments ont été exposés. Désormais, les invectives se poursuivent sur les réseaux sociaux. A gauche et au MCG, on défend avec vigueur ce projet, estimant qu’il apporterait une bouffée d’air nécessaire pour les habitants. 
Préserver le patrimoine 
A l’image de la députée suppléante verte Uzma Khamis Vannini, qui estime que l’acquisition de cette parcelle «est bien plus qu’une dépense. C’est un investissement dans l’avenir de notre Ville. Ce projet vise à préserver un patrimoine historique tout en offrant un espace vert essentiel (…).» 
De quoi pousser l’élue écologiste à tirer à boulet rouge sur les opposants au projet. «Le PLR vient de prendre la décision de refuser un parc à la population et le privatiser avec le lancement d’un référendum, sachant très bien que la vente doit être exécutée avant même que des votations puissent être organisées. (…) Ils ont choisi de refuser un poumon de verdure sur la rive droite, dans un quartier densifié, et qui aurait permis aussi à la rive gauche d’équilibrer la fréquentation de ses parcs», écrit-elle sur Facebook. 
Parmi ceux qui ne veulent pas de ce rachat, on retrouve également le Centre et les Vert’libéraux, à l’origine d’un référendum sur ce projet. Leurs griefs? «La majorité du Conseil municipal a décidé en urgence de dépenser 22,05 millions de francs pour acquérir un domaine de l’ancienne Campagne-Masset, sans lisibilité des coûts de transformation nécessaires ni des coûts d’entretien, et sans projet chiffré pour son utilisation», écrivent les deux partis. 
Précipitation et imprudence?
D’après les référendaires, cette transaction serait précipitée et imprudente, notamment au regard du budget 2025. «Si le Conseil municipal a été appelé à se prononcer en urgence, la population doit avoir la possibilité d’étudier de manière indépendante cet objet dès que les informations nécessaires seront disponibles, et de décider en connaissance de cause.»
Le Centre et les Vert’libéraux estiment donc qu’il faut être patients: «Nous sommes convaincus que des projets mieux développés pourront être présentés, qui profiteront davantage à la population des quartiers concernés ainsi qu’à celle des autres quartiers de la Ville de Genève.» Et de prendre pour exemple «la création d’un réseau d’espaces de détente végétalisés dans toute la ville, notamment au cœur des quartiers fortement minéralisés, où les habitants et habitantes en ont le plus besoin».
«Surprenant et décevant»
De quoi faire bondir les partisans du projet, à l’image de la MCG Yasmine Menetrey. «Il est surprenant et décevant de voir Le Centre et les Vert'libéraux s'opposer à ce projet, alors qu'ils ont eu toute la possibilité d'agir en amont. Les conseillers du Centre, présents en commission des finances et au Conseil municipal, avaient l'opportunité de poser les questions nécessaires et d'exprimer leurs doutes, mais n'ont pas pris leurs responsabilités à ce moment-là. Quant aux Vert'libéraux, leur absence actuelle au Conseil municipal de la Ville de Genève rend leur prise de position encore moins compréhensible. (…) Plutôt que de jouer la carte de l'incertitude, les partis devraient travailler ensemble pour préparer un avenir durable et équilibré pour les habitants», écrit la Municipale. 
Affaire à suivre.

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