Un cambriolage en rive droite relance le débat sur l’insécurité à Genève

Rédigé par
Adélita Genoud
Genève

La recrudescence de brigandages violents – en particulier les home jackings – et leur concentration dans certaines communes, tout comme les cambriolages qui engendrent, eux aussi, des traumatismes durables chez les victimes, suscitent l’inquiétude des milieux économiques et politiques. 

Le récent vol par effraction subi par une habitante d’une commune de la rive droite, illustre la préoccupation grandissante gagnant une part croissante de la population genevoise. Le canton est-il condamné à se barricader? Sylvie*, 80 ans, qui réside à Perly-Certoux depuis quarante ans, est désespérée. En l’espace de 5 ans à peine, elle a été victime de deux cambriolages. Et pourtant, ce n’est pas faute d’appliquer les règles préventives élémentaires. Son coffre-fort est en effet équipé d’un système d’alarme relié à une entreprise privée de sécurité. Et le portail de sa maison affiche clairement la couleur: le site est sous la surveillance de ladite société de protection. 
Alors? A la mi-novembre, l’octogénaire, qui a perdu son mari une semaine plus tôt, s’absente aux  alentours de 17h30. C’est, selon toute vraisemblance, moins d’une heure plus tard qu’un ou des malfrats font irruption. Après avoir complètement pulvérisé la véranda, ils pénètrent dans le logement, détruisant une porte au passage. A l’étage, ils  enfoncent encore une porte.  Le coffre-fort scellé, dissimulé derrière une paroi, est purement et  simplement arraché. Et avec lui disparaissent une importante somme d’argent ainsi qu’une boîte renfermant les montres de collection en or du défunt. Nul alentour n’a entendu le moindre bruit. Ni ceux des coups  de boutoir sans aucun doute nécessaires à l’extraction du coffre ni ceux provoqués par la véranda volant en éclats.
Et l’alarme?
Et l’alarme que Sylvie avait dûment actionnée avant de quitter les lieux? Elle s’est bel et bien enclenchée. Et les agents se sont aussitôt mis en route. Mais voilà, le trafic est particulièrement dense. Il faut dire que la commune, limitrophe de la France voisine, charrie chaque jour un flux de véhicules frontaliers imposant. L’équipe de sécurité privée est donc arrivée sur les lieux plus de trente minutes après que l’alarme a retenti. Les voleurs avaient bien évidemment pris la fuite.
Helena*, la fille de la victime, a sollicité le Conseil administratif de Perly-Certoux. Dans son courrier, elle explique avoir déjà interpellé le précédent Exécutif sur la nécessité d’équiper la commune de vidéosurveillance. «De nombreux bâtiments étatiques et écoles en sont dotés sans que ces dispositifs, utiles pour repérer des véhicules suspects, ne portent atteinte au respect de la vie privée. A l’heure où vous allez évoquer la mise en place de caméras aux abords de la déchetterie, dont je ne nie pas la pertinence, je pense qu’il est aussi temps de s’occuper de la sécurité de vos habitants», avait-elle précisé.
«Un dispositif injustifié»
La réponse, émanant des autorités communales, n’a pas convaincu Helena:«La Mairie estime qu’il n’y a pas lieu de prévoir des installations de surveillance.» 
Si Helena est inquiète pour sa mère, ce n’est pas pure paranoïa. La première infraction avait été très violente. Et les faux collaborateurs des SIG ainsi que les faux policiers qui avaient agi avaient réussi à s’emparer de bijoux de valeur. Et puis, ce n’est pas tout. Une autre habitante de cette commune a, elle aussi, été la proie de cambrioleurs... à cinq reprises.
Interrogée, la conseillère administrative de Perly-Certoux, Gaëlle Giuntini-Favre, déléguée à la sécurité explique: «Les statistiques fournies par la police cantonale font état, concernant 2024, de 15 vols par effraction, 27 dommages à la propriété et 17 violations de domicile. J’ai parfaitement conscience que chaque délit suscite une vive émotion dans un village qui compte 3304 habitants. Mais l'installation de caméras communales, comme le suggère votre intervenante, est encadrée par la loi sur l'information du public, l'accès aux documents et la protection des données personnelles  (LIPAD). Laquelle doit répondre à des critères stricts de sécurité (prévention d'agressions, déprédations), être proportionnée (nécessaire) et respecter la sphère privée. En l’occurrence, les infractions commises sur notre territoire ne justifient pas un tel dispositif.» Et d’ajouter que dans son courrier adressé à Helena, elle avait attiré son attention sur un point à savoir:  «Les autorités communales doivent s’en remettre au Préposé cantonal à la protection des données et à la transparence (PPDT), lequel vérifie et valide la mise en place de la vidéosurveillance, tant chez les particuliers qu’au niveau d’une collectivité publique. C’est lui que votre maman devra consulter si elle décide de faire installer des caméras de surveillance. Le domaine public entourant son portail (par exemple) ne peut en effet être filmé sans dérogation officielle et sans le respect de certaines conditions.»
Revoir l’éclairage public?
Soit, mais les autorités se contenteraient-elles d’agir seulement en réaction et non en prévention? Attendraient-elles une accélération des cas pour agir? «En aucun cas, reprend l’élue. Je viens de rencontrer une institution publique pour l’élaboration d’un projet comportant deux volets, l’un social et l’autre sur la sécurité. Par ailleurs, des contrôleurs du trafic, prochainement opérationnels et visibles sur le terrain, participeront à dissuader les malfaiteurs tout en rassurant la population. Nous  constatons d’ailleurs que la présence renforcée de la police municipale  de Plan-les-Ouates, avec qui nous sommes en partenariat, a réduit le nombre de cambriolages. Selon les données fournies annuellement, ces derniers sont passés de 34 en 2016  à 16 en 2024. Nous travaillons aussi à  un éclairage public plus  intense en divers points du territoire. 
En attendant, bon nombre de communes ont fait de la sécurité une priorité. Comme nous l’écrivions déjà dans notre édition du 26/27 novembre, Collonge-Bellerive a décidé d’agir activement pour la protection de ses habitants en optant pour  une présence accrue des agents de sécurité sur son territoire. D’autres ont multiplié la mise en place de caméras dans l’espace publique.

*Prénoms fictifs

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